Et si la lutte contre la carie pouvait passer par une approche plus douce, ciblant la virulence bactérienne plutôt que l’élimination du microbiote oral ? Une étude publiée dans la revue Antibiotics s’est intéressée au 3,3′-Diindolylméthane (DIM), un composé naturel qui montre un potentiel intéressant pour limiter la formation du biofilm de Streptococcus mutans, reconnu comme l’un des principaux acteurs de la carie dentaire.
Un contexte marqué par les limites des solutions traditionnelles
La carie demeure l’une des pathologies bucco-dentaires les plus fréquentes. Bien que l’hygiène bucco-dentaire, le fluor et certains antiseptiques aient démontré leur efficacité, leurs effets restent parfois non sélectifs et peuvent perturber l’équilibre du microbiote. Cela explique l’intérêt croissant pour des solutions dites « antivirulence », qui visent à neutraliser certains mécanismes pathogènes sans éradiquer les bactéries utiles. Le DIM s’inscrit dans cette nouvelle approche.
Une étude qui explore l’action du DIM sur le biofilm
Les chercheurs ont évalué l’impact du DIM sur S. mutans en laboratoire, dans deux conditions expérimentales : statiques et dynamiques, ces dernières reproduisant plus fidèlement l’environnement du milieu buccal. Le DIM a été testé à plusieurs concentrations afin de mesurer son effet sur l’adhésion bactérienne, la formation du biofilm, la production de substances extracellulaires (EPS) et la tolérance à l’acidité.
Des résultats encourageants
Les résultats montrent que le DIM parvient à réduire de manière significative la formation du biofilm. À une concentration de 0,5 µM, la diminution atteint près de 92 % dans les conditions statiques. L’étude révèle également une baisse importante de la production d’EPS, élément clé de la structure du biofilm et de l’adhésion de S. mutans aux surfaces dentaires.
Par ailleurs, le DIM semble affaiblir la tolérance de la bactérie à l’acidité, ce qui pourrait limiter sa capacité à provoquer des lésions carieuses. Fait notable, son action n’est pas celle d’un agent antibactérien classique : il ne détruit pas massivement la bactérie, mais diminue sa virulence. Ce mode d’action pourrait permettre de préserver l’équilibre du microbiote tout en réduisant le potentiel cariogène.
Quelles perspectives pour la pratique clinique ?
Si ces résultats sont prometteurs, ils restent à ce stade limités au laboratoire. Le passage à une utilisation clinique nécessite encore de nombreuses étapes : essais chez l’humain, évaluation de la tolérance, mise au point de formulations adaptées (gels, vernis, comprimés à sucer, etc.) capables de délivrer le DIM localement et de manière efficace.
Cette approche s’inscrit néanmoins dans une tendance émergente en odontologie préventive : privilégier des stratégies plus ciblées, moins agressives et respectueuses de l’écosystème buccal. Le DIM pourrait s’inscrire dans ce mouvement, s’il parvient à démontrer son efficacité et sa sécurité au-delà des modèles expérimentaux actuels.











